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American Rhapsody
20 mai 2006

114 - L'histoire triste de la semaine

C'est l'histoire banale d'un homme de presque quatre-vingts ans. Un homme dont la vie n'a pas toujours été un long fleuve tranquille, sans être particulièrement tumultueuse. Un homme qui a toujours vécu dans le plus grand respect des traditions américaines ; un ancien employé des aciéries de Pennsylvanie, qui coule une retraite paisible sous le soleil de Floride avec sa femme, recevant de temps à autre la visite d'un de leurs nombreux petits-enfants. Appelons-le Floyd.

Par une chaude journée de septembre, Floyd apprend qu'il est atteint d'un cancer du poumon. Quelques thérapies sont entreprises, sans succès. En janvier, son médecin lui propose d'envisager une dernière solution, une chimiothérapie qui pourrait, peut-être, augmenter son espérance de vie, alors évaluée à moins d'un an. Seul hic, le médicament en question coûte 2000 dollars par mois, une somme dont Floyd est loin de disposer.

En France, dans une telle situation, une commission de professionnels de la santé, plus ou moins spécialisés en oncologie, se réunit, pour décider de l'intérêt du traitement, en fonction des chances de réussite, des desiderata du malade... puisque c'est l'hôpital qui paye. Et c'est un sujet délicat, que de décider dans quelles situations dépenser beaucoup d'argent pour un espoir minime de sauver un malade.

Aux Etats-Unis, c'est plus facile, c'est au malade de payer, point.

L'efficacité du traitement restant plus qu'hypothétique, Floyd décide de s'abstenir d'emprunter de l'argent pour se le procurer. Il refuse aussi d'accepter de l'argent de ses enfants, sachant qu'ils devront faire de sérieuses économies pour se le procurer. Désormais, il ne prend plus que des anti-douleur.

Mais Floyd a un petit-fils différent des autres. Un petit-fils qui est le seul de sa famille étendue à être allé à l'Université, et qui poursuit d'ailleurs des études doctorales. Un petit-fils qui, dans sa dernière année de licence, a développé avec un autre étudiant un circuit intégré sur les détails techniques duquel nous jetterons pudiquement un voile de discrétion la plus totale. Invention sur laquelle les deux jeunes gens déposent un brevet début avril.

Et le petit-fils (appellons-le désormais le blondinet pour plus de clarté et de cohérence) commence alors à nourrir l'espoir de vendre le dit brevet et de pouvoir payer à son grand-père le traitement qui pourrait le soulager quelques temps.

Dans une période frénétique de surcharge de travail et soucis administratifs, le blondinet est contacté par un grand groupe industriel avide de plus d'informations sur ledit circuit intégré. Ses espérances commencent alors à devenir plus tangibles. Enfin, il organise une réunion avec son co-inventeur et les industriels pour un vendredi de mi-mai.

Le lundi précédent cette réunion, l'état de Floyd empire et celui-ci doit être transporté à l'hôpital. Son petit-fils est de plus en plus résolu à tout mettre en oeuvre pour convaincre les industriels.

Mais, soudainement dans la matinée du jeudi, le moniteur cardiaque de Floyd n'émet plus qu'un long biiiiiip prolongé digne des meilleurs épisodes d'Urgence.

Et la crémation a lieu au moment même où le blondinet se dirige vers son rendez-vous...

That's the way life goes, and life's a bitch.



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Commentaires
K
J'avais prévenu, hein, c'était dans le titre...
C
Bah moi qui était triste parce que je retrouvais plus des belles photos que j'avais faites de ton ange... je me sens toute petite...
T
C'est pas la joie ton histoire :(
N
Gloups.<br /> Histoire bien -triste en effet... :(
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