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American Rhapsody
27 janvier 2006

64 - Le plus beau métier du monde

Ca n'a pas grand chose à voir avec les Etats-Unis, la Californie ou ma thèse. Mais quand je lis une histoire comme celle-là, je ne peux pas m'empêcher de réagir. Ouaip, ça va être un peu beaucoup personnel, là.

En résumé, Alix a dû déscolariser sa petite fille de trois ans car l'institutrice ne voyait qu'un manque de capacité d'adaptation et de sociabilité dans le fait que cette petite fille était malheureuse à l'école et se faisait bousculer (ou battre) par ses camarades. Le tout étant bien entendu de la faute de la maman, si sa fille n'était pas normale.

Quand je pense que mon grand-père maternel gérait au Maroc une classe unique d'enfants de tous âges, qui venaient du bled, le concept de "gamin à problème", ça me dépasse.

Quand j'étais petite, j'étais loin d'être normale, moi aussi. (J'ai commencé tôt, oui, d'ailleurs pour ne rien vous cacher je me suis "arrangée" ou plutôt normalisée par la suite).

D'abord, j'avais un papa qui n'était pas souvent à la maison, d'ailleurs il n'y habitait pas vraiment, et puis c'était même pas pour des voyages d'affaire normaux comme les autres papas, c'est parce qu'il était en tournée, avec sa troupe de théâtre.

Ensuite, j'avais une maman qui travaillait, à l'hôpital, où elle était de garde un week-end sur deux. Une maman pas très sociable, qui entre son travail et sa fille ne sortait pas beaucoup, ne fréquentait pas beaucoup de gens, contrairement aux mamans normales.

Enfin, j'étais un véritable extra-terrestre, j'aimais pas courir et sauter partout dans la cour, j'aimais les bouquins. (A propos de lecture, je tiens à préciser que contrairement à la rumeur, ma mère ne m'a jamais forcée à apprendre à lire - c'est plutôt l'inverse - et ne m'a jamais forcée à lire que ce soit, ni de la littérature, ni des revues, non, rien du tout, et non je ne lisais pas le Nouvel Obs ni Libé à 7 ans, bo**el ! Oups, je sens que je m'énerve, là).

Bref, en petite section, j'avais un problème majeur. La sieste. Le moment où on colle les gamins surexcités et épuisés par une matinée d'école dans un lit pour qu'ils vous foutent la paix pendant deux heures. Ben moi, je pétais la forme. Comme j'étais une petite fille sage, je faisais rarement la foire, et je finissais par m'endormir d'embêtement dans ce lit. Résultat, le soir, à minuit, ma mère épuisée se retrouvait avec une gamine survoltée, une vraie pile électrique, qui voulait encore jouer, ou une histoire, ou apprendre à lire...

(Oui, et aussi j'aimais pas les tricycles, mais c'était plutôt un problème mineur.)

Sa fille dans une main, sa détermination dans l'autre, ma mère est allée trouver la maîtresse, pour voir si ce serait pas possible que je zappe la sieste et que je reste à m'occuper calmement dans un coin avec les mômes de grande section, qui eux ne faisaient pas la sieste.

C'est à cette occasion qu'elle a appris pour la première fois de la bouche de quelqu'un supposé s'y connaitre qu'elle était une mauvaise mère. Je vous rassure, c'était très loin d'être la dernière. Ah, et aussi que j'étais malheureuse que mon papa ne soit pas à la maison. (On peut ici admirer toute la perspicacité et la sagacité de l'instit' qui avait réussi à déceler ça chez une gamine qui faisait sagement tout ce qu'on lui disait de faire, qui ne pleurait pas, qui ne parlait jamais de ses parents, et qui pour tout vous dire n'avait même pas encore réalisé que ce n'était pas normal, un papa comédien jamais à la maison.).

Ce fut aussi un NON catégorique. En petite section, on fait la sieste, point. Pour qui se prenait-elle, ma mère, à vouloir que sa gamine soit privilégiée ?

Conseil de famille fut tenu avec mon grand-père paternel (ancien proviseur), ma grand-mère maternelle (ancienne institutrice) et mon père (qui fut - et est - un peu plus qu'un géniteur, figurez-vous). Vu que je savais lire, et que la déscolarisation était absolument non envisageable, rendez-vous fut pris avec le psychologue scolaire, pour me faire sauter une classe, et m'éviter ainsi la sieste.

C'est comme ça que j'ai sauté ma première classe.

Au passage, j'ai quand même failli passer pour retardée parce que je ne connaissais pas la différence entre "beau" et "laid". J'ai peu de souvenirs de cette époque, mais je me souviens de la crise que ma mère a piqué quand le psychologue lui a expliqué que je n'avais pas su dire lequel de deux visages était beau ou laid entre un visage triste et un visage souriant. Oui parce que le visage souriant est beau et le visage triste est laid. Ils ressemblaient à des smileys, en plus, ces visages, ils étaient sacrément laids tous les deux. Elle est belle, la tolérance qu'on apprend à l'école...

Je vous passe les détails, mais j'ai ensuite sauté le CE2 pour ne pas passer un an de plus avec l'instituteur odieux qui nous faisait essentiellement jardiner et jouer à la pétanque - oui, j'ai passé six mois à faire des cauchemards et à attendre que ma mère se lève (une heure théorique avant moi) pour aller pleurer "maman j'ai mal au ventre je veux pas aller à l'école".

Après, en sixième, je me faisais taper dessus par une bande de gamines qui ne supportaient pas qu'une pitchoune de 9 ans ait de meilleures notes qu'eux, mais c'est une autre histoire.

Toujours est-il que j'ai quand même eu la chance de pouvoir effectuer toute ma scolarité dans des établissements publics, même avec trois ans d'avance, notamment au collège grâce à ma prof d'allemand et celle de biologie. Et que j'ai aussi eu la chance d'avoir le niveau scolaire suffisant pour pouvoir les sauter, ces classes.

(Parce que non, je n'ai pas sauté de classes parce que ma mère pensait que j'étais un petit génie. Pour tout vous dire, ma mère ne voulait pas que je saute de classes, mais à chaque fois, en pesant le pour et le contre, ma famille a fini par penser que je serai plus heureuse en la sautant, cette classe. Et j'ai été consultée à chaque fois, et ça a été une décision difficile à prendre à chaque fois, une porte de sortie vers quelque chose de plus heureux, mais qui en même temps m'amenait à être rejetée par une partie de mes camarades...)

Et ça me révolte que la petite Mini d'Alix ait affaire à des enseignants encore plus obtus que les miens, qui en tenaient pourtant une sacrée couche. (Je vous ai déjà parlé de mon instit de CM qui organisait tous les mois une soirée parents-instit, dans l'école, avec de l'alcool, et où les enfants pouvaient sagement observer certains de leurs parents se saouler consciencieusement la gueule ?).

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Commentaires
K
Fébrile > Tu as compris l'idée.
F
si j'ai fini l'école, est-ce que c'est trop tard pour sauter une classe?<br /> moi aussi j'veux en sauter une
J
Voilà, j'ai lu... Moi aussi j'ai sauté une classe et je me suis retrouvé en 6ème à 9 ans (je suis d'octobre donc en septembre j'avais encore 9 ans) et pour pas qu'on m'emmerde, je faisais des dessins aux grands costauds pour qu'ils me protègent... haha !!!
F
Tout explique pourquoi tu passes ta thèse à 21 ans...<br /> <br /> J'aurais aimé aussi sauter des classes, je ne supportais l'ignorance et la bêtise de mes camarades qui n'aimaient que des choses futiles... qui ne comprenaient rien à ce que l'instituteur puis les professeurs expliquaient...<br /> <br /> Que faut-il fair ? élever ses enfants comme des bêtes pour qu'ils se fondent dans la masse ? Ou leur permettre de se développer et en faire des animaux de foire pour leurs camarades ?<br /> <br /> Dur dur...
K
Phrenq > Non, je n'ai pas parlé de la cinquième, c'est une autre histoire...
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